Je suis né en 1830, moi, le
colporteur, nul ne connaît mon nom, je n'en ai peut-être jamais eu.
Mes parents vivaient auprès des
rats et des détritus, pauvres gens, pauvre vie.
La chaleur, la puanteur, la misère
étaient notre lot. Notre nourriture se composait de ce que nous arrivions à
chaparder sans nous faire prendre. Quelquefois, un petit vendeur au grand cœur
nous offrait de quoi ne pas mourir de faim.
C'est ainsi que j'ai grandi,
pouilleux mais débrouillard.
Maintenant, seul, mon panier sous le bras, je vends
ce que j'ai acheté aux maraîchers le matin.
Je marche sur les pavés de Paris,
mon chez-moi.
Je suis connu, on m'appelle : « Hé,
colporteur ! Qu'as-tu dans ton panier qui pourrait faire mon affaire ?
Surtout ne me vole pas ! Je connais les prix ! »
Bien sûr, je les vole, c'est mon
métier ; souvent, je ramasse des légumes un peu défraîchis… Et alors !!!
En fin de journée, bien fatigué,
lorsque les bruits de la ville deviennent moins forts, soyeux, si j'ai eu
la chance de ramasser un mégot de riche dans le caniveau, je me roule une
cigarette.
Et ça, vous pouvez me croire, c'est
le bonheur.
Mon bonheur à moi, pauvre
colporteur.
La pluie tombait dru, froide sur l'homme inconscient des gouttes s'insinuant dans son dos.
Le visage ruisselant, les épaules voûtées semblant lutter contre le vent.
Il était, seul, ignoré, oublié du monde. Sa vie à lui, c'est la rue, la cavale, la peur. Bien sûr il a commis des erreurs, impossible de revenir en arrière, trop tard il le sait bien ...
S'il pouvait tout reprendre? Sa maison, son travail insipide mais qui faisait de lui un homme. Et surtout les siens, qu'il aime tant - ce qu'ils lui manquent ! Pourquoi l'ont il abandonné ?
Il a fait des bêtises, des grosses, de celles qui gâchent une vie, dont ont ne sort pas indemne. Maintenant sous la pluie, il tremble de froid, de peine, de dégoût de lui-même, des autres. Il a faim, il a soif, même le mauvais vin acheté chez l'épicier n'arrive pas à l'enivrer pour lui faire oublier qu'il est seul. Ce soir il dormira dans un coin de rue, qu'importe l'endroit, couché par terre.
Les passants l'ignoreront, ne le verront même pas.
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